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Concours d'Eloquence de la Jeunesse 2023

Par admin luxemburg-aubervilliers, publié le samedi 27 mai 2023 14:30 - Mis à jour le vendredi 2 juin 2023 09:01
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Rosa Luxemburg récidive au Concours d'Eloquence de la Jeunesse !

 

 

 

En avril 2022, 6 élèves de la classe de 3ième A avaient participé au Concours d'Eloquence de la Jeunesse dans le cadre de la semaine de l'Olympisme à l'Ecole. L’équipe, constituée de 4 filles et 2 garçons, avait bien tiré son épingle du jeu puisqu’elle était montée sur la deuxième marche du podium.
Fort de cette expérience, le collège a décidé de s’aligner à nouveau cette année sur les rangs de ce concours, qui regroupe chaque année de plus en plus de participants. Nous nous sommes donc inscrits dans la catégorie « collège », parmi 11 autres collèges de la région parisienne et de Paris.
L’inscription c’est bien, trouver des participants c’est mieux … mais force est de constater que les élèves ne se bousculent pas …. « Du travail en plus ? «, « Qu’est-ce qu’on gagne ? », « Il faut apprendre par coeur ? » Bref, une semaine avant le dépôt du nom de l’équipe et le choix de l’athlète paralympique qui sera le parrain de ladite équipe, personne en vue. Mais heureusement, « A qui sait attendre, le temps ouvre ses portes », et Fatima, en 3ième B, au terme d’un ultime appel à participation, se porte volontaire, entraînant derrière elle 5 de ses camarades : Abdallah, Anas et Iyad qui semblent assez enthousiastes, suivis de Oumar et Rayane, qui ne savent pas trop dans quoi ils s’embarquent, mais suivent les copains en toute confiance. Nous respectons de justesse la mixité obligatoire au sein de chaque équipe. Voilà l’équipe constituée, nous sommes début janvier, il faut donc s’y mettre …. Le concours aura lieu le 6 avril.
Cette année les jeunes s’affronteront autour de la question suivante : « Les jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 peuvent-ils aider à changer le regard sur les personnes en situation de handicap ? »
Première étape, choisir le sportif paralympique qui sera le parrain de l’équipe. Le choix du groupe se porte très rapidement sur Ryad Sallem qui a un profil très particulier puisqu’il à concouru aux Jeux paralympiques dans deux disciplines différentes : d’abord la natation, ensuite le rugby-fauteuil. Il va falloir le présenter en 1 minute. Ce n’est pas une mince affaire. Très vite, Anas a l’idée de pasticher un conte de fées pour présenter le destin hors du commun de cet athlète. Les autres membres du groupe se prennent au jeu et le texte s’élabore rapidement.
Pour la question proprement dite, c’est plus laborieux. Plusieurs séances sont nécessaires. On ajoute, on retire, deux pas en avant, trois pas en arrière. Les élèves ont d’ailleurs du mal à revenir sur ce qui est écrit. Ils sacralisent trop et trop rapidement ce qui est couché sur le papier. Mais je n’hésite pas à barrer sur les feuilles tout ce qui est lourd, répétitif, trop « écrit » …. Bref, c’est après plusieurs séances d’écriture et de réécriture que nous aboutissons à un texte, sinon définitif, au moins intéressant. La répartition des rôles se fait dans la bonne humeur. Je ne cesse de rappeler qu’il ne s’agit pas d’une prestation individuelle, ni de 6 prestations individuelles mais d’une prestation de groupe. Les choix ne doivent donc pas se faire au nombre de lignes de chacun mais selon les capacités et compétences de chacun.
Deux séances de filage répété du texte permettent à nos apprentis-tribuns de trouver leurs marques, de se familiariser avec le texte et au groupe d’améliorer ce texte au fil des suggestions des uns et des autres. Nous sommes encore loin du but car le ton n’y est pas, l’attention n’est pas toujours soutenue, les rares moments de pause se transforment rapidement en « amusement ». On s’énerve, je sermonne, on recommence... Heureusement qu’ils sont patients et enthousiastes. Et ici je tiens à souligner, malgré leur dissipation, leur pugnacité. En effet nous répétons le mercredi entre 12h15 et 13h30, alors qu’ils ont eu cours pendant toute la matinée. Quelques oranges et des dattes leur permettent de calmer leur faim et d’endurer les remontrances. Mais c’est leur bon esprit qui permet que, malgré quelques moments de tension, nous ne nous soyons jamais quittés fâchés.
Juste avant les vacances de février, Gilles nous rejoint et s’empare de la théâtralisation du texte. La tâche est immense : ils sont tout raides avec leur feuille dans les mains, ne peuvent pas s’empêcher de rire pour masquer leur inconfort. La partie n’est pas gagnée !
Les vacances de février arrivent et leur mission est d’apprendre leur texte par coeur. Je dois avouer que je n’y crois pas trop …. Mais ils me détrompent vite : ils ont appris leur texte et connaissent même une partie du texte de leurs camarades ! Belle surprise de rentrée. C’est d’autant mieux que M. Kanifi rejoint régulièrement le groupe d’élèves pour des répétitions supplémentaires le mercredi matin et chaque fois qu’une heure se libère dans leur emploi du temps. L’équipe accueille aussi Yesmine, fraîchement arrivée au collège comme Assistante Pédagogique, et intéressée par ce challenge. Tous ces « coachs » autour d’eux, ces répétitions de plus en plus fréquentes, l’approche de la date fatidique du 6 avril, mettent une belle pression sur les élèves et leur permettent de sortir de leur zone de confort. Et oui, il ne s’agit pas seulement d’apprendre un texte par coeur, il faut l’incarner ! Pour cela, il faut jouer avec le texte, le projeter vers les autres, le rendre vivant … ce n’est pas de la récitation ! Gilles et Yesmine leur font profiter de leurs techniques de théâtre : on s’envoie les répliques avec des balles, on s’exerce à l’articulation avec des phrases saugrenues. Un peu méfiants au départ, ils se lâchent et tentent tout ce qu’on leur propose. Ils ont confiance et avancent … Et avec tout ça, M. Kanifi qui ne cesse de les filmer pour qu’ils puissent se rendre compte de leur prestation, et qui va dénicher dans tous les coins du collège, à chaque séance, de nouveaux spectateurs, qui donnent eux aussi leur avis et contribuent ainsi à l’enrichissement du texte et de sa théâtralisation. J’en profite pour remercier Abdelrahman, qui a apporté des touches de décontraction au texte et à sa mise en scène, touches qui ont remporté un beau succès le jour du concours. Voilà un travail d’équipe !
Bref ils sont de plus en plus à l’aise, accueillent les remarques avec sérieux et continuent à progresser au fil des séances. Ramadan ne verra pas leur énergie s’amoindrir. Au contraire, nous sommes à deux semaines du concours et ils sont toujours aussi avides d’amélioration. Le groupe existe enfin : pour preuve tout le monde connaît l’ensemble du texte par coeur, ils sont de plus en plus déliés dans leurs déplacements et leurs interactions physiques. On y est presque !
Le 6 avril arrive enfin. C’est un jour de grève à la RATP, nous profitons donc d’un transport en car. Mme Mostefaoui nous accompagne, les élèves sont un peu impressionnés. M. Kanifi est là avec son énergie, son enthousiasme et son téléphone … pour filmer ! Gilles est malade, c’est dommage mais il nous envoie un mot d’encouragement que je transmets aux élèves. Je regrette que seuls 3 de leurs camarades de classe se joignent à nous : Martine, Jacopo et Mehdi. Voilà un point qu’il faudra travailler pour une prochaine prestation : réussir à faire de cette participation un challenge au sein de la classe ! Finalement ce bus, c’est bien, cela permet de répéter le texte encore quelques fois après s’être échauffé la voix avec Yasmine.
Nous traversons tout Paris pour arriver à l’Assemblée nationale. Contrôle d’identité, dépôt des manteaux au vestiaire, installation dans la salle Colbert, découverte des membres du jury. Tout s’enchaîne et le concours commence finalement à 10h00. Je me suis installée un peu en retrait du groupe pour être face à eux quand leur tour viendra et je les regarde avec beaucoup d’émotion : ils sont beaux dans leur « uniforme » jean-T.shirt blanc et très à l’écoute des premiers groupes qui défilent devant les membres du jury. Ils échangent à l’issue de chaque prestation, évaluant leurs chances face à ces autres jeunes venant d’autres collèges du 93, du 94 et de Paris.
Après avoir assisté à la présentation de 6 groupes, c’est finalement à eux. Yesmine les accompagne pour les placer et essayer les micros. Le chronomètre est lancé, c’est à eux. Et à ce moment-là, je les découvre comme si c’était la première fois : les dorures de la salle et les membres du jury qui sont installés à moins de 2 mètres d’eux ne les impressionnent pas du tout. Ils ont répété avec 6 micros, il n’y en a que 4, ils gèrent …. L’un répète le texte de son camarade au lieu dire le sien, tout le monde n’y voit que du feu. Un autre « oublie » une partie de son texte mais est immédiatement secouru par un de ses camarades, on ne retiendra de cet épisode que la réactivité et l’entraide dont ils ont fait preuve. Abdallah, Anas, Fatima, Iyad, Oumar et Rayane forment une vraie équipe et cela saute aux yeux de tous. Ils ont l’enthousiasme et l’audace de leur âge, et cela fait plaisir à voir. 6 minutes 57 ! Ils sont parfaitement dans les temps et reçoivent des applaudissements nourris de toute la salle. Ryad Sallem, le parrain de leur équipe, qui n’était pas présent à notre arrivée dans la salle a rejoint entretemps la salle Colbert et s’avance vers eux, dès la fin de leur audition, pour les remercier. Merci M. Sallem ! Ils rejoignent leur place, sur un petit nuage, encore sous le coup de l’adrénaline. 3 mois de préparation pour 6 minutes 57 de bonheur. Je suis certaine que certains d’entre eux se verraient bien occuper un siège de député dans quelques années !
Les présentations suivantes vont leur sembler bien longues tant ils sont fiers du travail qu’ils ont accompli et impatients de connaître l’avis du jury. Quand le verdict tombe, c’est à nouveau leur joie qui explose, leur joie de voir récompensés leurs efforts de plusieurs mois. Et nous les adultes qui les accompagnons, nous sommes aussi heureux de cette reconnaissance apportée à leur travail, à leur volonté, à leur capacité à se
remettre en cause, à accepter les critiques, à sortir de leur zone de confort pour contribuer à la réussite de tous.
Le retour en car se fait dans une ambiance joyeuse et nos lauréats sont heureux mais bien fatigués. Leurs 3 camarades de classe participent à cette joie et leur disent leur fierté d’avoir assisté à leur prestation. Et cette reconnaissance-là vaut sans doute pour eux au moins autant, sinon plus, que celle des adultes ! Aubervilliers nous accueille à nouveau. Nous retrouvons le collège et sommes bien loin des ors de l’Assemblée Nationale. Il va falloir rejoindre rapidement les cours de l’après-midi, mais j’espère que cette sortie, cette petite pause dans notre quotidien, restera dans leur esprit comme la preuve que tout est à leur portée.